Aujourd'hui cette cérémonie officielle nous rassemble . Monsieur et Madame Faure, Justes parmi les Nations, sont avec nous dans ce souvenir. Je leur dois ma vie. En acceptant de me sauver sur le plan physique, ils l'ont sûrement fait sur le plan psychique. Ils demeurent des figures exemplaires pour tous ceux qui les ont côtoyés. Leurs enfants ont de la chance d'avoir eu de tels parents.
1944 : Mes parents sont depuis 4 ans cachés dans un village du Limousin. La situation devient de plus en plus angoissante : Oradour-sur-Glâne ! Ma mère rapporte dans son journal que mon père rencontre à Limoges le mari de son amie d'enfance, pour lui faire part de son inquiétude à mon sujet s'ils venaient à disparaître. Monsieur et Madame Faure habitent alors une grande propriété à une vingtaine de kilomètres. A mon père qui demande l'immense service de me prendre pour me sauver, il répond sans hésitation qu'il accepte en son nom propre et celui de sa femme. Je rappelle qu'ils avaient déjà 6 enfants à l'époque, que sur la propriété vivaient à leur charge de nombreux réfugiés, membres de la famille ou amis, chassés par l'armée allemande. Je me souviens d'une façon précise de mon arrivée et du séjour, qu'ils me rendirent heureux, qui dura du printemps à fin septembre 1944. J'ai appris récemment que les absences de Monsieur Faure, alors capitaine de l'Armée Française, étaient liées à son engagement dans la Résistance. Quant à Madame Faure, tante Simone, elle était toulours là, avec une énergie à déplacer les montagnes, tellement bonne, sécurisante, apaisante. Une personnalité exceptionnelle de courage, droiture et intelligence. Le couple partageait un idéal d'humanisme catholique auquel il s'est conformé, sa vie durant, et qu'il a transmis à sa très nombreuse descendance. Chaleur humaine, générosité, continuité des liens, avaient pour eux un caractère d'évidence, qui conférait une autorité naturelle, et s'exerait particulièrement en réparation de la souffrance et de l'injustice. C'est dans ce contexte qu'ils m'ont accueillie, intégrée dans leur grande famille. Je passais pour une petite cousine, et le secret avait été transmis à leur fils a”né, adolescent à l'époque, comme un idéal partagé. Au cours de cette cérémonie, je ne puis que leur exprimer mon immense gratitude, quelques mots pour prendre acte des risques pris pour moi et dire aussi à leurs enfants la continuité de cette amitié d'enfance sur plusieurs générations, scellée par la reconnaissance. Je tiens à citer Francine Bouhara, qui m'a guidée dans le montage de ce dossier, et a aidé à le faire aboutir.
Le château des Villettes où furent accueillis la petite Viviane (ressin de Jean René FAURE, enfant de la famille qui avait le même âge et "savait"....